Selon les propos de Tacite mis dans la bouche de Schopenhauer dans
cet ouvrage, "la soif de la gloire est la dernière des choses à laquelle
l'homme sage doit s'intéresser". Et pourtant ne passons-nous pas notre vie
dans la quête de la reconnaissance de nos pairs ?
C'est l'évidence qui saute aux yeux de Julius Hertzfeld lorsqu'il apprend
qu'une maladie incurable le condamne à brève échéance. L'urgence l'assaille
alors de trouver sens à sa vie avant de la quitter. Il est un psychiatre
reconnu. Il se met en demeure de fouiller dans le registre de ses patients en
quête de ceux qu'il aura guéris de leur mal être et auront retrouvé ainsi goût
à la vie. Mais contre toute attente son attention se porte sur le nom d'un
homme, Philip, lequel souffrait d'une obsession sexuelle irraisonnée et
méprisante de ses partenaires, dont le cas aura été l'échec de sa carrière.
Philip en voie de devenir lui-même psychothérapeute cherche un tuteur pour sa
thèse. Un marché se conclut entre eux : Julius accepte de devenir son tuteur à
la condition que Philip intègre un groupe de patients en thérapie collective.
Féru de philosophie, de Schopenhauer en
particulier dont les préceptes lui ont permis de trouver apaisement à son
addiction au sexe, c'est à contre coeur que Philip intègre le groupe. Il voue
en effet à ses congénères la même misanthropie que celle qui animait son maître
à penser en son temps. Cette indisposition sera augmentée lorsqu'il découvrira
parmi les personnes constituant le groupe une de ses partenaires d'un soir. Elle
cultive logiquement à son endroit une rancoeur féroce.
Gagné à l'obsession de faire de sa vie un bénéfice pour les autres et non de
laisser le souvenir de sa personne, Julius déploie son ardeur à guérir Philip
de l'affliction qu'il identifie comme l'origine de tous les maux sur terre :
l'indifférence voire le mépris de l'autre. Lequel s'était exprimé chez lui par
des conquêtes sexuelles innombrables et sans lendemain.
Voilà donc le quatrième ouvrage que je lis de la main d'Irvin Yalom.
Après Nietzsche, Spinoza, Épicure, je le
retrouve aux prises avec les thèses de Schopenhauer.
le psychothérapeute qui se ressource chez les philosophes se frotte dans cet
ouvrage au plus atrabilaire d'entre eux à l'égard de ses congénères. Son
intention étant de contrer la propension des uns à fuir leurs semblables,
dont Schopenhauer s'était
fait un porte drapeau, et à faire naître la conviction que la communauté
humaine ne peut être que réconfort de tout un chacun lorsqu'il est confronté à
l'angoisse de la mort. Julius s'en est convaincu lui-même en forme de
résilience après avoir accusé le coup de l'annonce de sa fin prochaine.
La caractéristique de la vie est son impermanence. La mort est inéluctable.
Aussi Irvin
Yalom, à l'unisson des grands philosophes humanistes, veut nous convaincre
que la meilleure façon de l'aborder est de donner sens à sa vie, en se tournant
vers les autres et non se focalisant sur sa propre personne. de pouvoir se dire
à l'échéance ultime que l'on revivrait volontiers la même vie, si tant est
qu'elle fut dépourvue de l'âpreté au gain, de la satisfaction de ses moindres
désirs, y compris sexuels, lesquels ne sont que voleurs de conscience.
Irvin Yalom intègre
son lecteur dans le huis clos de cette thérapie de groupe. Il développe les
cheminements de pensée, étudie l'interaction des caractères et les processus
d'évolution des mentalités vers le but que s'est fixé son héros et porte
parole. Ce dernier se montrant le moins invasif possible dans les échanges, son
rôle se limitant à relancer une discussion qui s'essouffle ou au contraire à
calmer les ardeurs qui s'enflamment.
Comme à l'accoutumer dans les ouvrages d'Irvin Yalom, la
thérapie portant essentiellement sur la libération de la parole, il fait le
plus grand usage du dialogue dans ceux-ci. Cette méthode a le mérite de donner
vie à l'écrit et de rendre la lecture très fluide. L'intrusion de la
philosophie dans la psychanalyse est passionnante. Elle veut nous convaincre
que l'homme doit s'assumer lui-même y compris et surtout en envisageant sa
propre mort. Ne pas avoir recours aux expédients d'une quelconque religion,
reposant donc sur la croyance, qui n'est à ses yeux, lui promettant une vie
après la mort, que duperie et refus d'assumer sa finitude.
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