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mercredi 20 février 2019

La troisième Hemingway ~~~~ Paula McLain

 


Ernest Hemingway a eu quatre épouses. Dans Madame HemingwayPaula McLain nous dressait le portrait de la première d'entre elles, Hadley Richardson. Avec cet ouvrage, La troisième Hemingway, c'est sur Martha Gellhorn qu'elle pose son regard. Autant la première a été celle qui avait cru en lui, avait soutenu, stimulé ce parfait inconnu qui tirait alors le diable par la queue. Autant Martha Gellhorn fut celle qui a dû se battre pour exister face au monstre de célébrité qu'il était devenu entre temps. Deux femmes, deux courages. Et malheureusement pour elles, deux déceptions amoureuses.

Lorsque je me suis vu proposé de confier ma perception de ce nouvel ouvrage de Paula McLain, je n'ai pas hésité une seconde. Persuadé que j'étais de retrouver dans La troisième Hemingway, ce talent avec lequel l'auteure avait su me faire entrer dans l'intimité de ses personnages, sans sombrer dans le parti pris ou le voyeurisme. Paula McLain sait convaincre de la sincérité sentimentale, de la force de caractère qu'il a fallu à ces femmes pour exister en des époques où la notoriété ne pouvait être que masculine.

Avec un style agréable et limpide, l'auteure fait revivre ses personnages avec une incroyable authenticité. Personnages féminins qu'elle évoque avec une complicité subtile, sans se laisser déborder par la solidarité féminine qui ne peut pas ne pas l'animer. Surtout lorsque ces femmes sont confrontées à des monstres de célébrité comme cela a pu être le cas avec Hemingway.

Martha Gellhorn s'est battue pour exister, ne pas rester à l'ombre de ce mari célèbre et envahissant, être reconnue pour elle-même puisqu'elle écrivait elle-aussi. C'est sans doute une des raisons qui l'a poussée à prendre tous les risques dans ce métier de reporter de guerre qui répondait à ses aspirations aventurières. C'est ce combat-là, d'être soi-même et non le faire valoir d'un autre, ou la femme de …, que Paula McLain nous fait appréhender dans cet ouvrage consacré à la troisième épouse du futur prix Nobel de littérature.

En contre poids de ses sentiments à l'égard de l'écrivain repu de son succès, consciente de la faiblesse de sa position, Martha Gellhorn a tenu à préserver son indépendance. Elle a eu l'intelligence de dominer ses sentiments, en forme de mise à l'épreuve de ceux de son illustre époux. Prudente, elle n'a pas voulu avoir d'enfant de son héros tout en se prenant d'affectation pour les trois garçons qu'il avait eus avec ses deux premières épouses. Une mise à l'épreuve qui dévoilera malheureusement la volatilité de cet époux et sa soif d'exclusivité. le talent est exigent, le succès est égoïste. Martha Gellhorn s'est brûlé les ailes au contact de cet homme des cavernes avide de la reconnaissance des autres, avare de la sienne.

C'est à chaque fois un univers féminin dans lequel Paula McLain nous incorpore. C'est tellement bien écrit qu'on voudrait qu'il soit objectif. Elle choisit des personnages forts qui n'inspirent pas la compassion. Je repense à cet autre ouvrage de son cru qui m'avait séduit, L'aviatrice. Il y a chez cette auteure cette grande faculté à lier les références historiques avec une atmosphère du quotidien des plus crédibles. Y aurait-t-il de sa plume un ouvrage sur les autres madame Hemingway que je m'empresserais de me le procurer.


vendredi 28 juillet 2017

Madame Hemingway ~~~~ Paula McLain

 

Solitaire qui n'aimait pas la solitude, Ernest Hemingway eut quatre épouses. Paula McLain s'est prise de sympathie pour la première d'entre elles, Hadley Richardson. Elle en a fait la narratrice de ce bel ouvrage, Madame Hemingway. C'est l'histoire romancée d'un épisode de la vie de cette femme avec celui qui accédera à la consécration suprême de son art en recevant le prix Nobel de littérature en 1954.

Journaliste, correspondant de guerre, écrivain, Ernest Hemingway n'a pas été aventurier que dans sa vie professionnelle. Celles qui ont partagé sa vie affective en ont fait les frais. Paula McLain a mis son talent d'écrivain au service de Hadley et lui fait revivre cette idylle de six années qui restera à jamais dans la mémoire de celle-ci comme l'épisode dramatique de sa vie.

Paris au lendemain de la première guerre mondiale, des expatriés américains se retrouvent au sein ce que l'une d'entre eux, Gertrude Stein, immortalisera sous l'expression de génération perdue. Une génération d'artistes et intellectuels qui tentent inconsciemment d'exorciser dans l'alcool et les fêtes le cauchemar de la grande guerre. Elle avait avalé leur jeunesse et fait tomber trop tôt sur leurs frêles épaules une maturité précoce nourrie d'angoisses. Ernest Hemingway qui a connu les affres de la guerre en Italie, dont il tirera L'adieu aux armes, se retrouve volontiers sous ce label. Il ne craint pas d'explorer l'absurdité de la condition humaine lorsqu'elle se livre aux horreurs qu'elle fomente.

Grand témoin des conflits du vingtième siècle, amateur de corridas, de courses de chevaux, de chasse, sa soif de sensationnel, de liberté s'est assouvie au détriment du bonheur de celles qui ont choisi de partager sa vie. Paula McLain nous dresse un portrait admirable de Hadley, femme simple et courageuse, d'une grande sincérité, peut-être un peu naïve, que rien ne prédestinait à quitter son Amérique natale pour s'enfoncer dans le drame avec cet homme, de six ans plus jeune qu'elle, qui trouve logique de vivre à trois quand on ne peut choisir entre deux amours. Paula McLain nous fait prendre fait et cause pour ce personnage désintéressé qu'elle sait rendre attachant lorsqu'elle partage la vie de galère du futur prix Nobel encore loin de la célébrité, dans un sordide deux pièces parisien.

Une histoire dramatique formidablement conduite par Paula McLain. Elle nous donne un autre éclairage sur la personnalité du célèbre écrivain. Il ne peut que baisser dans notre estime au sortir de ce roman, grisés que nous sommes de la notoriété qui auréole désormais sa carrière d'écrivain. La gloire de l'un n'irait donc t'elle pas sans l'avilissement d'autres restés dans l'anonymat ?

Avec son écriture souple et épurée, Paula McLain se garde bien de tomber dans l'emphase. Elle préserve ainsi l'authenticité des sentiments de cette femme restée fidèle en amour à l'égard d'un Hemingway avec qui elle correspondra jusqu'à l'ultime moment de sa vie.
On s'interroge toujours sur les raisons du choix d'un auteur pour le personnage de son roman. Beaucoup vous répondront que c'est en fait le personnage qui s'impose à l'auteur. Ce qui me fera dire que Madame Hemingway ne pouvait trouver plus belle plume pour sortir de l'anonymat. Car en donnant ce titre à son roman, elle confère une certaine exclusivité à cette union, et reconnaît sans doute en Hadley la plus légitime des épouses d'Ernest Hemingway. Celle qui n'a jamais douté du talent de son mari alors que le succès se faisait encore désirer.
Cette histoire romancée est un superbe moment de lecture.


dimanche 28 mai 2017

L'aviatrice ~~~~ Paula McLain

 


Fallait-il rendre justice à Beryl Markham, pour que Paula McLain lui consacre un ouvrage, au demeurant fort réussi à mon sens ? Mais lui rendre justice de quoi au juste ? De ne pas avoir eu avec son récit auto biographique, Vers l'ouest avec la nuit, le même accueil que Karen Blixen avec le sien devenu si populaire, La ferme africaine, adapté au cinéma sous le titre Out of Africa.

Ces femmes ont toutes deux vécu, au début du vingtième siècle, une vie d'aventure au Kenya, alors colonie britannique. Elles se sont beaucoup fréquentées, appréciées mutuellement. Elles ont même partagé le même amant. Mais ça, ce n'est pas le point commun qui aurait pu renforcer leur amitié.

On peut même affirmer que Beryl Markham aura autrement marqué l'histoire que Karen Blixen. Si cette dernière a passionné son public en sachant mettre par écrit son amour de l'Afrique, du Kenya en particulier, premier regard vraiment respectueux des peuplades qu'elles a côtoyées, Beryl Markham, qui cultivait la même passion pour ce pays et ses autochtones pour y être née, a quant à elle ajouté à son crédit des prouesses propres à battre en brèche le monde masculin de ce temps, dont le moins que l'on puisse dire est qu'il n'était pas enclin à voir des femmes lui damer le pion.

Elle a été la première femme à obtenir son brevet de pilote professionnel et surtout à avoir traversé l'Atlantique d'est en ouest. Exploit à laquelle rien ne la prédisposait, si ce n'est son formidable goût de l'indépendance, son courage à toutes épreuves, sa capacité à rebondir quand tout avait périclité, tant dans les domaines professionnel qu'affectif. Si la chance lui a souri, elle ne l'a dû qu'à son audace, son opiniâtreté et son mépris d'une mauvaise réputation dont les jaloux ont voulu l'affubler.

Avant de se lancer dans le pilotage d'aéroplanes, elle avait déjà fait ses preuves sur les terrains exclusivement réservés aux hommes, en réussissant comme entraîneur - mot que l'on ne peut toujours pas mettre au féminin sans verser dans un registre plus péjoratif - de chevaux de course.

Abandonnée comme elle par sa mère durant sa prime enfance, Paula McLain s'est sentie très proche de ce personnage atypique au point de nous livrer une magnifique biographie romancée dans laquelle les fresques paysagères et les récits d'aventure nous donneraient la nostalgie du temps des colonies, si ce dernier terme ne comportait pas en lui-même son propre discrédit. Cette auteure à l'écriture fluide et sans métaphore a su parfaitement mettre en valeur ce curieux mélange qui caractérisait Beryl Markham, une sauvageonne à la beauté pourtant féminine. Personnage qui n'a dû son succès qu'à sa philosophie certes primitive, apprise à courir pieds nus avec les autochtones, mais au demeurant plus humaine que celle qui avait cours dans les salons de la société coloniale, laquelle se qualifiait sans rougir de bonne société.

Le style agréable de Paula McLain me donne le goût d'inscrire à ma liste de lecture une autre biographie de son cru : Madame Hemingway.