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Pierre
Loti l'écrivain voyageur a jeté l'ancre au Pays Basque. Pays dont il
tombe amoureux, pas seulement pour ses paysages, mais aussi pour ses habitants
dont il apprécie le caractère bien trempé. Il les apprécie au point d'y fonder
une seconde famille avec une femme du cru qui lui donnera quatre garçons dont
un certain Raymond. Qui en basque se dit Ramuntcho.
Au pays basque il y reviendra régulièrement. Il y fit l'acquisition d'une
maison sur les rives de la Bidassoa dans laquelle il a voulu vivre ses derniers
jours. Son engouement pour cette contrée lui a inspiré ce roman, Ramuntcho. Plus
que dans tout autre il dévoile sa sensibilité propre.
L'énergie romanesque de son ouvrage s'en trouve enrichi d'une prose aux élans
poétiques. Sa plume s'alanguit dans des envolées mélancoliques à rendre jaloux
les romantiques. Mais l'amoureux contemplatif reste un être lucide. Il ne perd
de vue que la vie n'a rien d'un tapis de rose. Que les amours et les amitiés
sont souvent contrariées par les événements, les codes moraux, les
intérêts. Ramuntcho,
le contrebandier qui ne craint pas les douaniers, le joueur de pelote qui fait
l'admiration de tous en fera l'amère expérience.
Le regard de Gracieuse – on appréciera le choix du prénom - la belle qui avait
conquis le coeur de Ramuntcho,
s'éteint doucement dans l'ombre d'un couvent dans lequel l'a fait enfermer sa
mère. Jusqu'au dernier chapitre on brûle de savoir si Ramuntcho réveillera
ce regard et attisera à nouveau son bonheur du souffle de l'amour.
Pierre Loti est
un poète éveillé dont le réalisme teinte les oeuvres d'austérité. Son acuité
dans la perception du monde le retient de dresser un tableau idyllique de la
vie. Ses amertumes lui donnent l'occasion de donner quelques coups de griffes à
la religion qui pour le coup est plus une prison qu'un secours.
Chacun de ses personnages dévoile un peu plus son auteur. L'homme d'action
quelque peu fantasque qui s'enflamme pour un lieu, une personne, sans cesse
attiré par des ailleurs espérés plus doux, n'en finit pas de se chercher. le
bonheur lui file entre les doigts comme le sable des plages. Autant que lui a
pu filer sur les mers d'un bout à l'autre du monde, s'attachant à une
japonaise, une turque, une basque, un matelot breton.
Si peu à son épouse légitime. Ramuntcho n'est
pas d'elle. Mais le roman est touchant.