Archives du nord, un ouvrage quelque peu déséquilibré qui en
trois parties évoque successivement la nuit des temps, puis les ascendants
directs de Marguerite
Yourcenar, ses grand-père et père, qu'elle n'appellera jamais autrement que
par leurs prénoms respectifs. Curieuse approche filiale, plus historiographique
que sentimentale.
Evocation sans concession de l'histoire d'hommes et de femmes qui ont présidé à
sa venue sur terre et dont il serait vain de retenir la généalogie, sauf à se
passionner pour la science qui curieusement étoffe la ramure d'un arbre
familial en exhumant ses racines personnelles.
C'est encore la maestria dans la mise en œuvre de la langue qui m'a poussé à me
frotter au feu roulant, quelque peu déprimant, des innombrables références
culturelles dont Marguerite Yourcenar peuple ses ouvrages. Etalage
qui pourrait sembler humiliant à l'égard du besogneux se glorifiant de sa
maigre bibliothèque, ou complètement abscons au décrypteur d'idiomes qui a fait
sa culture dans le fouillis de qu'il faut aujourd'hui appeler la toile - pour
mener un combat retardateur et franciser l'expression connue plus que dans sa
version d'outre atlantique.
Marguerite Yourcenar dont on connaît la fibre écologique semble avoir plus
de compassion pour faune et flore que pour celui qui les martyrise depuis
qu'homo sapiens a pris le pas sur tout ce qui pouvait le concurrencer sur la
planète, plus d'affinité pour des personnages faits maison tant ils ont été
bâtis pour servir d'ambassadeur à sa cause, tel Zénon, qu'à l'égard de ses
géniteurs.
Les ouvrages de Marguerite Yourcenar, lecture plaisir pour qui s'ébahit
devant la puissance conceptuelle de la phrase, la richesse documentaire,
lecture déplaisir pour qui aspire aux langueurs sentimentales.
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Ouvrages par genre
dimanche 13 août 2017
Archives du nord ~~~~ Marguerite Yourcenar
samedi 7 juin 2014
L'enfant de Bruges ~~~~ Gilbert Sinoué
Avec cet ouvrage, Gilbert Sinoué nous transporte au 15ème siècle, dont les historiens ont fait une transition entre la Moyen-âge et le Renaissance, avec pour décor les prestigieuses cités de Bruges et de Florence. C'est un véritable “polar” dans lequel l'intrigue et les personnages tiennent le lecteur en haleine, jusqu'à ce que … le soufflé retombe. Mais n'en disons pas plus quant au dénouement.
La technique émergente de la peinture à l'huile est venue concurrencer, et peut-être condamner, la peinture a tempera. C'est en tout cas ce qui suscite l'intrigue. Je veux bien admettre être passé à côté de l'événement - de cette locution latine aussi - mais celui-ci est présenté comme une véritable révolution dans l'histoire de “l'Art des arts”. A tel point qu'il provoque un choc des consciences contemporaines averties et une réaction aux tournures imprévisibles, à la violence aveugle.
Comme à l'habitude avec Gilbert Sinoué, nous prenons une leçon d'histoire. Outre bien sûr le héros, Jan van Eyck, grand peintre flamand, on fréquente la cour de Côme de Médicis à Florence, on s'y rappelle que le Duc de Bourgogne régnait sur les Pays-Bas, que Nicolas Rolin a fait ériger les Hospices de Beaune, que nous sommes à l'époque de l'ouverture au Nouveau Monde, à la veille de la démocratisation de l'écrit par l'imprimerie et enfin que les Grands de ce monde l'étaient d'autant plus qu'ils s'érigeaient en mécènes.
Ce n'est pas, à mon sens, le fleuron de la bibliographie de Gilbert Sinoué. C'est comme ça que je le perçois. Mais avec cet auteur il y a toujours des richesses à glaner et cela reste d'un excellent intérêt. Ne serait-ce par l'ancrage de ces péripéties dans un contexte historique et les sujets de réflexion que cet ouvrage suscite sur le rôle de l'art dans la société et dans la vie tout simplement.
Il y a bien sûr aussi ces thèmes qui pourraient être perçus comme secondaires mais qui fondent en réalité la pensée humaniste de l'auteur. On les retrouve dans ces fameux coups de griffes à tous les promoteurs d'intolérance et d'immoralité auxquels il nous habitue dans ses ouvrages. L'esclavage est un des thèmes ciblé dans celui-ci, où les Noirs africains y sont présentés, dans la bouche d'Anselm de Veere, comme le “brouillon de Dieu” avant la création de sa grande oeuvre. On s'interroge aussi sur la place de la Femme dans ce roman très masculin, son accès difficile au devant de la scène. La mère adoptive de Jan est effet une marâtre mal aimante. Sa mère biologique ne fait qu'une apparition fugace. Elle est blâmée du crime d'abandon, même si pour son rachat, l'auteur lui fait donner sa vie pour sauver son enfant.
Quant au sujet essentiel de cet ouvrage dans la monde de l'art, on appréciera
les descriptions documentées des techniques picturales, mais aussi la
compréhension de ce principe du mécénat, seule chance pour un artiste d'émerger
et de vivre de son art. C'était bien entendu extrêmement élitiste. Dans ce
domaine, comme dans la vie en général à cette époque, seuls les plus forts
avaient des chances de survivre. C'était pour l'art, en tous cas, un gage de
qualité.