Il a seize ans et va être fusillé avec d'autres innocents pris en otages comme lui.
"Je suis ton ami" lui dit l'aumônier allemand qui l'accompagne au
supplice. Il n'hésitera pourtant pas à le dénoncer dans sa tentative d'évasion.
L'amitié aussi a ses tyrannies.
Nous sommes en 1943 et 1944. Albert Camus écrit à son ami allemand d'avant-guerre.
Quatre lettres dans lesquelles il lui clame que ceux qui ont rêvé d'un
"avenir fabuleux et ensanglanté" pour l'Europe se sont fourvoyés et
seront vaincus. A cette "nuit d'Europe" succédera une aube d'autant
plus radieuse que les vaincus d'hier seront sans haine contre ceux de demain.
Les vaincus d'hier finiront par "détruire leur puissance sans mutiler leur
âme".
Quatre lettres. Quatre cris de colère d'un sans Dieu contre ce "désastre
de l'intelligence".