Une façon d'approcher un personnage célèbre consiste à faire la connaissance de ceux qui ont partagé sa vie. C'est ce que nous propose Alexandra Lapierre avec cette biographie romancée de la femme de l'auteur de L'île au trésor : Fanny Stevenson. Un ouvrage particulièrement fouillé et documenté. Il faut dire que la correspondance entretenue par les époux Stevenson avec leurs familles respectives et leur entourage, baignant souvent dans les milieux artistique et littéraire, a été particulièrement abondante.
Alexandra
Lapierre en tire un ouvrage absolument captivant sur ce que fut la vie
de cette femme hors du commun. Elle voua une dévotion passionnée à l'égard
de Robert
Louis Stevenson. Elle a été tout sauf une pâle figurante dans la vie de
celui qu'elle avait épousé après avoir arraché le divorce à son premier mari,
ce qui dans l'Amérique puritaine du 19ème siècle était déjà une prouesse en
soi. Fanny
Stevenson a véritablement sacrifié sa vie à celui envers qui elle
nourrissait un amour démesuré, au point de se rendre jalouse de sa propre fille
lorsque cette dernière empiétait sur le rôle de première lectrice des oeuvres
de Stevenson.
La posture favorite de Fanny
Stevenson était de se ranger du côté du plus faible. Épouser Robert Louis
Stevenson restait dans cette droite ligne si l'on considère sa santé
particulièrement fragile. Au point que cet aspect a commandé toute leur vie. Il
leur a fait parcourir le monde à la recherche d'un climat favorable à
l'apaisement des hémorragies pulmonaires dont souffrait cet homme. Optimiste de
nature, il ne s'en plaignait pourtant jamais.
Stevenson terminera
sa vie et sera enterré aux îles Samoa, au sommet du mont Vaea. Fanny qui
n'avait émis la moindre objection à s'isoler au milieu du Pacifique, quand
c'était pour son mieux aller, l'y rejoindra 20 ans plus tard. Ils avaient tous
deux gagné la vénération des populations autochtones en soutenant leur combat
contre la colonisation.
On ne lirait que trois pages de cette passionnante biographie romancée fort
volumineuse, ce serait la lettre que Fanny
Stevenson a adressée à celui qui était un de ses points d'ancrage,
l'avocat Rearden, pour lui apprendre la mort de son fils, le petit Hervey (page
181 - éditions Pocket). Ce texte, à lui seul, fait comprendre combien cette
femme ne vivait que pour les autres, pour les plus faibles et son
exceptionnelle dignité dans le chagrin.
La vie de Fanny
Stevenson a été particulièrement riche en aventures et en amour dédié
aux autres. Elle est tout sauf ennuyeuse au lecteur. Alexandra
Lapierre sait nous faire admirer et aimer ce personnage hors du
commun, le réhabiliter aussi, même si c'est par solidarité féminine, quand
d'aucuns ont pu le dénigrer. Dans ce couple singulier qu'ils ont formé tous
deux, tirant souvent le diable par la queue, elle a vécu, tel que le sous-titre
l'auteur, entre passion et liberté.