Pourquoi 29, et pas 28 ou 30 ? La réponse est simple et compliquée à la fois. Si on veut faire simple, on répond parce que c'est comme ça. C'est ce que disaient les hommes et femmes qui avaient fait leurs les 29 principes dictés par Djambo. Si on veut approfondir, on lit La forêt des 29 d'Irène Frain.
C'est tiré de faits réels. Cela s'est passé il y a longtemps, au XVème siècle
au Rajasthan. Il y a d'ailleurs encore des prolongements de ce phénomène de nos
jours. Modestes par leur ampleur géographique certes, mais incommensurables si
on les considère à une échelle moins égocentrique que celle de l'individu. Car
finalement tout est là. Au niveau de l'individu, cet être qui naît, vit et
croît sur terre. Cet être assoiffé de tout pour lui-même et fait qu'aujourd'hui
dès des premiers jours d'août la terre vit à crédit sur les ressources qu'elle
peut offrir dans l'année.
Djambo aurait pu passer pour un illuminé, un gourou. Mais Djambo a été
respecté. Il était "entré dans le non-temps où vivent les héros, les
prophètes et les dieux." Respecté même par les plus avides, les plus puissants
de ses voisins, lesquels n'avaient de cesse de convoiter, guerroyer, piller,
s'approprier personnes et biens. Lesquels n'avaient de cesse d'accumuler des
richesses et se vautrer dans les plaisirs, au plus grand mépris de l'autre, de
demain. Et quand, par les tenants de l'une ou l'autre des religions, venait la
question quel est ton Dieu, Djambo répondait : regarde autour de toi, Dieu est
là dans cet arbre, les yeux de cette biche, les ailes de ce papillon, le chant
de cet oiseau, le fruit de ce manguier, il est là partout autour de toi. Dieu
est là à portée de main, Dieu c'est la Nature. Tout doit être respecté, toute
forme de vie
sur terre, du plus petit ver de terre au plus grand arbre de la forêt, au
mettre titre que cet homme, cette femme ou cet enfant, quelle que soit ses
origine, race, apparence et croyances. Avec Djambo, dans la forêt des
29 il n'y avait ni caste, ni clan, ni chef, encore moins de prêtre.
Surtout pas de prêtre.
"Ce monde n'est qu'un campement provisoire. Et toute liturgie, un
mensonge, une farce…"
Les 29 principes de Djambo – énoncés en fin d'ouvrage - n'ont d'autre finalité
que de conserver aux êtres leur liberté, soumis qu'ils resteront aux seules
lois de la Nature, afin de préserver le fragile équilibre du Monde. Equilibre
qui lorsqu'il est perturbé peut avoir les conséquences les plus néfastes sur la
vie des hommes. le problème étant d'en faire comprendre à ces derniers la
relation de causes à effets, puisque toujours éloignés dans le temps. Relation
que ces derniers se font fort de mépriser, harcelé qu'ils sont par le poison du
désir. Criminelle fuite en avant vers une perdition reniée, mais de leur fait
devenue inéluctable.
"Le seul lieu des hommes c'est le Temps. Il se chargera de les
rattraper."
Un ouvrage qui interpelle à n'en pas douter. Comment ne pas extrapoler à ce que
nous vivons aujourd'hui. Car si les appropriations sont moins brutales, encore
que, l'irraisonnée soif du bien matériel a toujours la même prégnance sur la
vie des hommes. Un ouvrage qui est quant à lui certes un peu long à imprégner
son lecteur, mais qui, lorsque son objectif est entrevu, l'absorbe globalement,
au même titre, on peut l'imaginer, qu'à pu le faire le regard envoûtant de
Djambo sur ceux qui l'ont croisé.
Un ouvrage que j'ai tardé à tirer des rayons de ma bibliothèque. Reposé deux
fois après en avoir lu quelques pages. Puis enfin lu. Comme quoi les dispositions
d'esprit du moment changent l'abord des choses. Il y a un temps pour tout, tout
entendre, tout lire. Car c'est un ouvrage que j'ai finalement beaucoup
apprécié, même si son écriture peut comporter à mon sens des anachronismes de
langages eu égard à l'époque des faits qu'il relate. Mais n'est-il pas vrai
aussi qu'il se raccroche au temps présent tant la nature humaine a aussi peu
évolué dans ses défauts depuis les immémoriaux alors que l'animale est restée
constante dans son incidence sur la nature.