Mon univers de lecture ... ce qu'il m'inspire

mercredi 14 septembre 2016

Des souris et des hommes ~~~~ John Steinbeck

 


Quelle curieuse manie que celle de Lennie d'aimer caresser le duveteux d'un pelage. Celui de la souris morte dans sa poche par exemple ou encore de ce chiot qui vient de naître. Fût-ce au péril de ce dernier. Mais il ne s'en rend pas compte. Lennie est un grand balourd simplet.

Et qu'en serait-il du soyeux de la chevelure d'une femme, un peu aguichante par exemple…?

George le surveille de près. Il l'a pris en affection et lui dicte sa conduite, même s'il l'énerve un peu. Parce que Lennie est un gentil, qui l'écoute et lui obéit. Le problème avec Lennie est qu'il ne connaît pas sa force. George sait surtout que Lennie ne mériterait de toute façon pas la sanction d'une de ses bêtises.

Les souris sont à la fois malicieuses et agaçantes, mais si attendrissantes. Les hommes quant à eux … on ne connaît que trop leurs vices. C'est pour cela qu'il faut protéger Lennie.

Magnifique roman, très court, de Steinbeck dont le titre est si bien choisi.


lundi 12 septembre 2016

Profession du père ~~~~ Sorj Chalandon

 



Alors qu'il enterre son père, le temps est venu pour Emile Choulans de raconter ce qu'a été son enfance. Une enfance sans amour, sans secours, entre ce père tyrannique et une mère à l'étrange indolence. Une enfance de brutalité et de solitude.

Il n'en veut pourtant pas à ce père indigne. Sans doute parce qu'avec ses scenarii fantasques sur fond de fin de guerre d'Algérie, André s'était pris au jeu de cette mythomanie guerrière. N'a-t-il pas usé lui aussi de certains subterfuges auprès de Luca Biglioni, le seul camarade dont il a pu s'attirer la sympathie.

C'est à mon sens le style qui caractérise le plus cet ouvrage. Un style fait de phrases courtes, parfois sans verbe. Un style qui veut dire qu'Emile ne s'alanguissait pas sur sa condition, n'épiloguait pas sur son sort. Sa vie de maltraitance était normale, il n'avait rien connu d'autre. C'est ce que nous dit ce style compartimenté, sans fioriture.

S'il est vrai que la fiction donne libre cours à toutes les intrigues que l'imagination peut concevoir, je n'ai toutefois pas beaucoup cru à cette vie d'insondable soumission, sans la moindre révolte, ni de la part de ce fils qui a conservé une forme amour filial obligé, étiolé, envers ce père détestable, ni de la part de cette mère effacée, transparente, à l'amour prudent, craintif. Etrange assujettissement, sans rébellion, une vie durant, puisqu'une fois éjecté de chez lui à la majorité, comme un malpropre, sans préavis, Emile reviendra pourtant vers le tyran pour jalonner les événements marquant de sa vie : son alliance avec une femme d'origine kabyle, la naissance de son fils qui aura droit quant à lui à l'amour le plus sincère.

Ce drame familial est quand même bien construit. C'est l'histoire d'un secret domestique. Une tare inavouée. Par candeur, par crainte, par pudeur, par honte, on ne sait. Une tare qui enlaidit toute une vie.


Malraux ~~~~ Sophie Doudet

 



Voilà une biographie qui n'est pas seulement une énumération de faits chronologiques entre la naissance et la mort de son sujet. J'ai été passionné tant par la personnalité de Malraux que par la façon qu'a eue Sophie Doudet de me faire faire connaissance avec lui. Elle s'est livrée à une analyse psychologique périlleuse du personnage, très réussie à mon goût, pour un homme qui écrasait son entourage, sans aucun mépris, de sa formidable culture, toutes disciplines confondues.

De Malraux j'avais gardé en mémoire quelques souvenirs inconsistants. Ce n'était pour moi qu'un ministre de de Gaulle. Mon esprit avait aussi curieusement imprimé ce célèbre "entre ici Jean Moulin", extrait du discours théâtral, grandiloquent, vibrant, que j'avais entendu incidemment, prononcé à l'occasion de l'accueil de la dépouille de l'héroïque résistant au Panthéon. J'étais bien entendu passé à côté de l'essentiel. Sophie Doudet me l'a fait percevoir avec grand talent.

Avec son ouvrage, j'ai fait la connaissance d'un personnage inclassable, si ce n'est comme porte étendard de la culture dans ce qu'elle a d'universel. Il est difficile d'évoquer le personnage sans paraphraser l'auteure, aussi ne le ferai-je pas plus, mais il est des personnes dont on se demande comment elles ont pu faire autant de choses majeures dans une seule vie. Malraux est désormais de ceux-là à mes yeux.

De passage à Sarlat-la-Canéda durant ce mois de septembre, j'ai été content d'y trouver, à peine cet ouvrage refermé, une plaque saluant le résistant, l'auteur de la loi sur la restauration des villes historiques. Un clin d'œil dans la vie, s'additionnant à d'autres en strates cumulatives, pour sédimenter ce que Malraux a passé sa vie à promouvoir en tant qu'instigateur des maisons de la culture.

Mais s'il ne fallait retenir qu'une leçon de ce personnage, ce serait pour moi son rapport à l'art. Cet "aristocrate de la pensée et de l'action" n'avait ni dieu, ni maître, sauf peut-être l'art. Il retrouvait chaque œuvre d'art "un fragment de la noblesse du monde". Lui qui avait franchi la frontière de la légalité, en tentant de s'approprier de statuettes de l'art khmer, voyait dans les œuvres d'art la signification du geste créateur. Ce personnage si complexe, si haut, parfois empêtré dans ses contradictions lorsque livré à l'exercice du pouvoir, avait identifié dans l'art quelque chose de plus fort que la vie, qui restait pour lui la seule survivance possible alors que rien ne résiste à l'oubli.

"L'art est un anti destin"


vendredi 26 août 2016

Persuasion ~~~~ Jane Austen

 


S'il on en croit Salman Rushdie dans le grand entretien du dernier numéro du Magazine littéraire, il est "difficile d'écrire un livre qui dure dans un monde qui change".

Qui contesterait que les livres de Jane Austen aient franchi les siècles et que le monde ait pu changer depuis leur première parution ?

Force serait donc de conclure à la prééminence du grand talent de cette auteure pour perdurer au travers de ses écrits. N'est-ce pas le rêve inavoué de tout écrivain que de survivre à soi-même en ayant l'audace d'imaginer ses propres lignes courir sous les yeux des générations futures ?

Pour ce qui est des romans de Jane Austen, ce n'est pourtant ni les intrigues qui les échafaudent ni le modèle de société dans lequel elles se développent qui les distinguent à mes yeux. L'intrigue, se résumerait-elle toujours à la même question qui appellerait toujours la même réponse quand deux cœurs

 cherchent leur connivence ? Quant au modèle de société, celui qui hiérarchise les personnes du seul fait de leur naissance, il a bien fait de disparaître. Au diable "ceux qui comptent", ceux qui ordonnancent la "bonne société", ceux qui savent "tenir leur rang" contre vent et marées et à l'écart les autres, "de plus basse extraction", "sans patronyme prestigieux". Au diable la "respectabilité" quand elle est due au seul fait de la "condition", au seul fait d'être "bien né".

Et pourtant avec de tels handicaps dans ses ouvrages, Jane Austen a su faire de moi, autodidacte à la maigre culture, en ce 21ème siècle ultra connecté, un récidiviste parmi ses innombrables lecteurs depuis son lointain 18ème siècle. Je viens de terminer mon 3ème ouvrage de sa main, Persuasion, son dernier roman, dont on dit qu'il serait le plus abouti.

Outre l'intérêt historique de ces œuvres avec leur représentation de la société anglaise du 18ème siècle, c'est à n'en pas douter la qualité de la langue qui m'a fait revenir vers Jane Austen après Orgueil et préjugés puis Northanger Abbey. Comme un retour aux sources de la bonne formulation, de la signification originelle des mots, du savoir dire des sentiments.

Je conçois fort bien revenir de temps à autre vers cette écriture si parfaite, en alternance avec une écriture plus moderne dans laquelle je trouve aussi mon contentement.

Lire, encore et toujours, et puis Jane Austen parfois, pour le plaisir de la langue.


mercredi 10 août 2016

La Horla ~~~~ Guy de Maupassant

 



Nombre de couvertures des multiples éditions de cet ouvrage de Maupassant, le Horla, sont illustrées par le célèbre tableau de son ami Gustave Courbet : le Désespéré. Il saute aux yeux à sa lecture que cette mise en image est on ne peut plus appropriée au contenu de ce recueil. Surtout pour la nouvelle première qui lui vaut son titre.

Il est une autre évidence, en tout cas pour ce que j'ai ressenti à cette lecture, qui est que, dans cet ouvrage, Maupassant se joue de son lecteur. La maturité de sa renommée lui autorise cette liberté. Quitte à perdre de l'audience.

Chacune de ses nouvelles laisse son lecteur sur sa faim. Car elles n'ont pas de fin justement. Encore moins de morale. Maupassant laisse cette responsabilité à son lecteur. Mais au final celle qu'il pourra tirer ne saurait être immorale car les bonnes moeurs sont préservées. Il abandonne son lecteur au milieu du gué. Le laisse imaginer la suite. Voire même parfois construire le puzzle dans lequel chaque fragment de vie trouvera sa place.

Chaque nouvelle est comme un instantané pris dans la vie de ses personnages, un épisode extrait au hasard du roman feuilleton de leur existence. On regarde avec lui quelques photos, sans autre rapport elles que d'être enfermées dans le même album.

On sent bien que l'effet est recherché. C'est toutefois peu frustrant. N'est resté à mes yeux que le formidable style de son auteur pour sauver ce recueil de la perplexité, parfois de la langueur, dans laquelle il m'a plongé.


jeudi 4 août 2016

Une petite robe de fête ~~~~ Christian Bobin

 


Un livre de Bobin, c'est comme une compression de César. Ça procède d'une intention insondable. Ça ne sert qu'à vous exalter ou au contraire vous offusquer.

Il l'écrit lui-même : de cette lecture " vous ne retenez rien, ou juste une phrase. Vous êtes comme un enfant à qui on montrerait un château et qui n'en verrait qu'un détail, une herbe entre deux pierres, comme si le château tenait sa vraie puissance du tremblement d'une herbe folle".

Un livre de Bobin ne raconte pas d'histoire. N'a ni intrigue, ni suspense. Ni début ni fin. Ne répond à aucune question. Ne fait que vous interpeler, vous interroger, vous déconcerter. De sa lecture vous ressortirez agacé ou dithyrambique, mais pas indifférent. Mais de la gangue vous pourrez quand même extraire quelques pépites.

"C'est quoi au juste prier. C'est faire silence. C'est s'éloigner de soi dans le silence".

"Partout l'appel, partout l'impatience de la gloire d'être aimé, reconnu, partout cette langueur de l'exil et cette faim d'une vraie demeure – les yeux d'un autre".

"Un livre est grand par la grandeur du désespoir dont il procède, par toute cette nuit qui pèse sur lui et le retient longtemps de naître".

C'est ça un livre de Bobin. C'est court. Ça vous laisse perplexe. On se dit qu'on n'y retouchera plus. Puis on y revient.


dimanche 24 juillet 2016

Souveraineté du vide. Lettres d'or ~~~~ Christian Bobin



N'imagine pas fréquenter des sentiers battus avec Christian Bobin.

N'imagine pas tirer sur un brin de laine qui sort de l'écheveau et dénouer une intrigue. Il n'y en a pas. Un bouquin de Bobin, c'est un sac de noeuds. Noeuds au cerveau, au coeur, noeuds à l'âme.

Un bouquin de Bobin, tu peux le commencer à la page 57, le lire à rebours, le reprendre n' importe où, dans l'autre sens, de toute façon tu n'iras pas vers la fin, il n'y en a pas.

Alors qu'est qu'il y a dans un bouquin de Bobin ?

De la lumière et du sang. Il aime ça !

Du sang, pas le genre hémoglobine qui coule à flot dans les séries policières de bas étage. du sang comme celui qui véhicule la vie dans ton corps animal. du sang qui irrigue ton cerveau. du sang qui permet cette curieuse alchimie qui transforme un phénomène physique en prodige psychique.

Cette alchimie qui transforme le plomb en or ?

Oui si tu veux. Si le plomb c'est la lourdeur de ton corps de mammifère, si l'or c'est l'éclat de tes pensées. Celles qui font de toi un être pensant. Donc inquiet.

Un bouquin de Bobin, c'est une collision de fulgurances qui cascadent dans les synapses de ses neurones, pour gagner les tiennes. Comme une osmose. Ce phénomène physique qui équilibre la concentration des substances au travers d'une paroi poreuse.

De la lumière ? Pas celle de la lampe à incandescence. Celle qui éclaire ton âme. Celle dans laquelle tu baigneras quand tu auras fait le grand saut dans l'inconnu. Tu sais bien, cette échéance qui te fait peur. La lumière céleste !

Un bouquin de Bobin, y'en a qui peuvent trouver ça un brin circonvolutions mielleuses. D'autres grandement sublime. Tous auront raison. A partir du moment où ils rangeront le prosélytisme aux oubliettes.

Un bouquin de Bobin et moi ?

J'y pioche quelques phrases. Elles me font réfléchir. Je trouve qu'elles dédramatisent des sujets graves. Alors, des fois, ça me fait du bien.

Mais pour en parler avec les autres, c'est difficile. Parce qu'un bouquin de Bobin, c'est pour toi, pour ton intérieur intime.

L'avantage avec un bouquin de Bobin, c'est que tu peux le tirer de son rayon de ta bibliothèque, lire une ou deux pages et le reposer. Y revenir, ou pas.

L'avantage avec un bouquin de Bobin, c'est que tu peux ne pas le lire. 

dimanche 17 juillet 2016

L'ignorance ~~~~ Milan Kundera


 

Partir c'est mourir un peu. Mais est-ce renaître ailleurs ? Est-ce renaître au retour ?

Erina n'avait pas vraiment envisagé de rentrer à Prague. Émigrée à Paris 20 ans plutôt, elle avait fait de sa nouvelle vie une perspective sans retour, même si sa terre d'accueil ne lui avait pas ouvert les bras avec spontanéité. La France était désormais sa terre d'avenir. Aussi a-t-il fallu que son compagnon Gustaf l'incite et prenne l'initiative pour que ce retour aux sources se concrétise.

Milan Kundera connaît trop bien le sujet de l'exil. Il connaît les effets des forces contrariées de la dictature qui broient les uns, éjectent les autres hors de la funeste centrifugeuse. Avec L'ignorance, il nous livre une réflexion sur le déracinement, la nostalgie qui taraude et leurre, la mémoire trop personnelle et trop ponctuelle pour donner lieu à partage, l'arithmétique du temps qui passe, la modernité qui n'apporte pas son lot de réconfort, autant de notions qui font qu'à la question "quel est ton chez-toi ?", l'exilé restera dans la même tergiversation que celle qui a présidé à son départ.

L'absence est une mort qui pourrait avoir un terme si les liens de l'amour résistaient au temps. Mais la déconvenue de ceux qui restent, la méfiance de ceux qui accueillent détricotent le tissu affectif de celui qui a fait le choix, ou non, de partir. Son avenir sera pavé de solitude. Son chemin sera aussi instable que le fil du funambule. Quand il penchera d'un côté, ce sera la chute.

Avec Milan Kundera, le coeur a toujours une relation au corps. Cette matérialité de l'être humain qui seule révèle le temps qui passe. Avec ses pulsions elle ne fait que chercher des compensations aux frustrations affectives.

L'exil ne restera jamais qu'une condamnation avant l'heure.


vendredi 15 juillet 2016

Churchill ~~~~ Sophie Doudet

 



Bien sûr que le nom de Winston Churchill parle à nombre d'entre nous. D'aucun pourra l'associer au Royaume-Uni, à la seconde guerre mondiale, à une silhouette trapue, gros cigare à la bouche, et au fameux V de la victoire figuré avec les deux doigts d'une main dont on lui attribue la paternité.
Mais qui sait, ou se rappelle, qu'il a été un artiste peintre non dénué de talent et que ses écrits lui ont valu le prix Nobel de littérature en 1953.

Etonnant personnage dont il serait vain de tenter de faire le portrait en quelques mots quand une biographie y suffit à peine, aussi bien faite soit-elle, comme celle de Sophie Doudet. Qui n'aurait de goût pour ce genre historico-littéraire pourrait ne lire que le dernier chapitre intitulé "le grand artiste". Car cette appellation convient au demeurant fort bien à ce personnage comme l'histoire n'en produit que très peu. Sans doute faut-il aussi que les circonstances soient exceptionnelles, pour faire émerger de la grande masse anonyme du commun des mortels une personnalité de ce gabarit. Notre époque en manque cruellement.

Winston Churchill a d'autant plus de mérite à son action qu'il l'a conduite dans le plus pur respect des règles de la démocratie, quand les contemporains de son époque contre lesquels il luttait ne s'empêtraient pas de l'obligation de la reconnaissance des peuples : Hitler, Mussolini, Staline, Franco.

Artiste il a été à plus d'un titre, car on peut appliquer ce qualificatif à nombre de ses talents, à commencer par celui d'orateur, galvanisé par l'exercice de ce talent en public et non devant une caméra qui efface les réactions de l'auditoire. Artiste de la formule, de l'humour, d'une piquante répartie dont nombre de ses contradicteurs ont fait les frais. Et faudra-t-il lui adjoindre un talent de visionnaire, car figurez-vous que Churchill, confiant qu'il était dans la force insulaire de son pays, était partisan d'une Europe unie, mais en dehors de la Grande Bretagne. Bluffant non ?

Mais surtout, surtout, il faut admirer la force de caractère hors du commun du personnage, jamais aussi performant que lorsqu'il est dans la difficulté, seul contre tous. Seul même contre Dieu, pour lui arracher autant de sursis dans sa vie, au point de le prolonger jusqu'à 90 ans, alors que son rythme et son régime de vie auraient condamné un être faible à brève échéance.

Pas étonnant qu'il ait ferraillé contre un De Gaulle, autre géant dans l'épreuve, après l'avoir accueilli à Londres avec ces mots : "Vous êtes tout seul – eh bien je vous reconnais tout seul".

Quel personnage, quel mec dirait-on aujourd'hui, fort bien dépeint par Sophie Doudet dans cet ouvrage chez Folio biographies.


samedi 9 juillet 2016

La part manquante ~~~~ Christian Bobin

 


La prose de Christian Bobin n'est jamais qu'une poésie qui s'affranchit de la contrainte de la rime.

Une autre marque de fabrique de cet auteur est son obsession à prendre le contre pied des évidences, du communément admis par la pensée éduquée à l'observation de la vie. Point d'expérience qui vaille, tout est remis en question. le bonheur attriste quand le malheur soulage, la lumière coagule quand le sang étincelle.

Heurts et malheurs du lecteur que je suis, balloté, harcelé par l'indiscipline des phrases courtes qui fusent, par la fulgurance de traits de pensée qui lacèrent mon ciel comme des comètes.

Il faut s'y faire, la pédagogie de l'expérience est bafouée, l'esprit foisonne en désordre. La part manquante est un beau fouillis duquel on a du mal à extirper l'intention de l'auteur. Y'en a-t-il d'autre d'ailleurs que celle de satisfaire un esprit qui cherche à en féconder un autre.

On peut le lire en tout sens, en tout temps. Je perds pied quand même. Attention à l'overdose.
Mais avec Christian Bobin on se rassure, la mort est une naissance. Un ouvrage en appelle un autre.