Dans la première moitié du 20ème siècle, la petite Patricia vit avec ses parents dans une réserve animalière au Kenya. Elle s'est vu confier l'élevage d'un lionceau devenu orphelin dès les premiers jours de sa vie. Elle s'est inévitablement éprise de l'animal. Devenu adulte, il n'a bien sûr plus rien de la charmante peluche qu'elle avait choyée mais conserve pour celle qui lui a donné le biberon un attachement dont on ne sait trop ce qu'il peut augurer s'agissant du comportement d'un grand fauve. Sa mère est horrifiée de la voir partir dans la brousse retrouver l'animal qui ne ferait qu'une bouchée de Patricia. On le serait à moins.
...la relation que peut tisser un être humain avec un animal en général, un fauve en particulier...Cet ouvrage est pour Joseph Kessel prétexte à engager le débat sur la complexité de la relation que peut tisser un être humain avec un animal en général, un fauve en particulier. Celui-ci ne reste jamais qu'une proie potentielle pour un prédateur parmi les plus puissants. Ce roman est une approche de la psychologie animale quant aux sentiments que d'aucuns sont tentés de lui prêter, quand d'autres ne voient en l'animal qu'une bête capable d'émotions commandées par l'instinct, servi par les sens en éveil, dont l'odorat est souvent le plus fin chez l'animal, et armé de crocs et griffes redoutables.
S'agissant d'un ouvrage publié en 1958, à une époque où l'écrivain a atteint sa maturité littéraire, on y trouve une étonnante sensibilité du baroudeur qu'a été Joseph Kessel dans l'approche de la psychologie enfantine. Approche aussi de l'étude des mœurs, traditions et coutumes des peuplades autochtones, les Massaïs en particulier. L'accession à l'âge adulte pour un garçon de cette ethnie comportait la mise à l'épreuve de son courage dans l'affrontement avec le lion.
Une lecture en 2021 ne manque pas de mettre au jour des archaïsmes de langage comportant des expressions désormais bannies, faisant référence à des postures de colonisateurs qui prêtent aujourd'hui à la culpabilisation. La promotion de la négritude au rang de culture par Léopold Sédar Senghor et Aimé Césaire ne lui a pas encore ôté sa connotation péjorative dans l'esprit des ex colons.