Suite française est un ouvrage très émouvant à lire. En premier lieu parce que l'on sait qu'il est écrit sur le vif, contemporain des événements servant de base aux intrigues romanesques qu'il met en œuvre. En second lieu et surtout parce que l'on sait que la plume d'Irène Némirovsky est restée suspendue dans l'attente d'une suite qu'elle avait imaginée et qui ne verra pas le jour.
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Ouvrages par genre
lundi 9 août 2021
Suite française ~~~~ Irène Némirovsky
Suite française est un ouvrage très émouvant à lire. En premier lieu parce que l'on sait qu'il est écrit sur le vif, contemporain des événements servant de base aux intrigues romanesques qu'il met en œuvre. En second lieu et surtout parce que l'on sait que la plume d'Irène Némirovsky est restée suspendue dans l'attente d'une suite qu'elle avait imaginée et qui ne verra pas le jour.
mercredi 4 août 2021
Chaleur du sang
C'est dans les pages de Babelio que j'ai fait la connaissance d'Irène Némirovsky. J'ai toutes les raisons de m'en féliciter et remercie celles et ceux qui y ont partagé leurs impressions de lecture de ses ouvrages. Après Jézabel, je viens de terminer Chaleur du sang et ai déjà entrepris la lecture de Suite française.
samedi 31 juillet 2021
Les vaisseaux du cœur ~~~~ Benoîte Groult
Benoîte Groult l'annonce en avant-propos : « le langage ne viendra pas en aide
pour exprimer le transport amoureux ».
Alors pourquoi écrire ? L'écriture n'est-elle pas la forme pérenne du langage,
autant que son support résiste à l'usure du temps. Pourquoi faire durer les
traces d'un langage qui n'exprimera jamais ce qu'est ce « frisson mystérieux »
de l'amour ? Pourquoi d'ailleurs cette incapacité de l'être intelligent à
décrire ce qui constitue sa quête de toute une vie ?
Benoîte Groult connaît
bien l'écueil. Elle franchit pourtant le pas. Elle le fait dans ce roman qui
m'a prouvé que si le langage a cette insuffisance de ne savoir décrire la quête
suprême de l'intime, il est certaines personnes pour le décrypter mieux que
d'autres et le suggérer. Les poètes sont de celles-là. Benoîte Groult est
de celles-là. Je conserve le présent à dessein à son propos, n'avons-nous pas
encore le fruit de son ressenti à notre disposition dans ses écrits.
J'ai aimé que ce soit une femme qui aborde la nature de la relation amoureuse y
compris et surtout lorsque cette relation s'exprime par la communion des corps.
L'homme a ce boulet au pied qui le décrédibilise sur le sujet. Avec lui,
l'amour s'assimile trop spontanément au sexe. Il ne pense qu'à ça, nous
disent-elles. Et pourtant Benoîte Groult ne
dissocie pas l'amour du sexe, bien au contraire. Elle le fait dans ce roman en
confidence crue d'un amour adultère : la relation qui réunit George, sans s
comme George Sand, une écrivaine universitaire en histoire et Gauvain, un pêcheur
breton. Ils se sont connus adolescents, feront leur vie chacun de son côté et
se retrouveront périodiquement. Obstinément. le sujet est abordé sans fausse
pudeur. S'interrogeant de savoir si ce n'est que pour le sexe qu'elle et lui font
autant d'efforts pour se rencontrer. George [elle] y répondant aussitôt avec un
franc démenti : « ça vient de plus loin, de plus profond … c'est aussi puissant
qu'une communion mystique ».
George [elle] est toujours à l'initiative pour provoquer leurs rencontres avec
pourtant la ferme conviction que c'est l'absence qui sauve leur amour. «
Attendre un amant est bien meilleur qu'accueillir un mari. » Elle veut bien se
priver de son amour mais pas le perdre. « À vivre longtemps éloignés, il est
vrai qu'on se laisse emporter par ses rêves. On finit par aimer quelqu'un qui
n'existe plus tout à fait mais que dessine votre désir. » L'idée que son amant
existe quelque part et pense à elle l'aide à vivre. Il en est de l'amour comme
de toute chose, il ne pourrait résister à l'usure du quotidien.
Pour cerner au plus près l'évidence irritante du désir amoureux, alors que
l'ensemble de l'ouvrage est narré à la première personne, dans certains
chapitres évoquant la rencontre charnelle, George abandonne le « je ». Elle
s'extrait de la narration et parle d'elle à la troisième personne, se plaçant
alors en contemplatrice objective de leurs corps enlacés. S'employant par la
même occasion, en féministe obsessionnelle qu'est Benoîte Groult, à
ce que nul n'exerce d'ascendant sur l'autre : « nos sexes n'étaient plus mâle
et femelle, nous nous sentions hors de nos corps, un peu au-dessus plutôt, nous
balançant très vaguement, âme à âme, dans une durée indistincte ». Consciente
que dans l'histoire de l'humanité les femmes se sont fait flouer, elle
s'attache à abolir toute tentation dominatrice de l'un ou l'autre dans la joute
amoureuse. Avec quand même une petite pique revancharde affirmant que «
contrairement à ce que l'on prétend, c'est l'homme qui se donne en amour. le
mâle se vide et s'épuise tandis que la femelle s'épanouit. »
Mais « le sexe n'est pas aussi sexuel qu'on le dit » la rencontre des corps
quand elle ne répond pas une obligation de fréquence et de performance est « un
vertige qui fait perdre la notion du bien et du mal ». C'est en construisant ce
roman d'une relation amoureuse idéalisée que Benoîte Groult nous
parle le mieux de cette « délicieuse drogue d'être adorée », d'être l'objet
d'un « désir qui n'a pas de configuration descriptible. »
C'est donc une femme qui dédiabolise le sexe. le féminisme c'est aussi cela.
C'est conférer aussi aux femmes l'initiative dans ce domaine. Ne plus le subir,
à condition toutefois de restituer à la rencontre charnelle cette dimension qui
en fait non pas une obligation mais une preuve d'amour. C'est en en parlant
sans se voiler la face, avec tout le vocabulaire que le langage peut gauchement
y appliquer que chacun peut parvenir à son épanouissement propre. Faire que
s'aimer ne soit pas « une banale union des corps … mais rester deux jusqu'au
déchirement ». Son amant « n'est pas et ne sera jamais son semblable. C'est
peut-être ça qui fonde leur passion. »
Benoîte Groult a
réussi l'exploit de me parler de sexe dans l'amour, aussi crument qu'on peut le
faire, parce qu'il est chose humaine, mais sans être jamais obscène. Il n'en
reste pas moins que la sublimation du sentiment tient beaucoup au désir et au
rêve qui seuls fomentent la plus sublime des extases. La rencontre
occasionnelle des corps ayant cette forme d'aboutissement indispensable pour
entretenir la mémoire et stimuler l'imaginaire. Benoîte Groult ne
m'a pas parlé d'amour au féminin. Elle m'a parlé d'amour entre deux êtres qui
ont trouvé leur point d'équilibre, à égale convoitise, égal accomplissement. Ni
homme, ni femme. L'amour a tout nivelé. Ensemble ils sont passés de l'autre
côté de la vie « quand elle tient tout entière dans l'instant. »
Reste un autre mystère : pourquoi eux ensemble, pourquoi elle, pourquoi lui ? Mais là force est d'admettre avec Benoîte Groult qu'il n'y a rien de plus impossible à comprendre et raconter que l'amour.
samedi 24 juillet 2021
Ainsi soit-elle ~~~~~ Benoîte Groult
"J'imagine les lecteurs de bonne volonté que leurs
femmes auront décidés à parcourir ce livre…" Ainsi s'engage le chapitre V
d'Ainsi soit-elle.
Hé bien moi, je vous le dis Madame Benoîte Groult, il y a
des hommes qui auront lu votre ouvrage de leur propre initiative. Je suis de
ceux-là. Ce n'est en outre pas la première que je lis un ouvrage féministe.
J'avais commencé par le Deuxième sexe de Simone de Beauvoir, voilà bientôt deux
ans. Vous me rétorquerez que c'est un peu tard. Je vous donnerai la réplique
que l'on fait toujours à pareille admonestation. Mieux vaut tard que jamais. Je
prendrai toutefois mes distances en déclarant ma neutralité. Je ne suis ni
féministe ni misogyne. J'ai sur la nature humaine un regard asexué qui me fait
parfois déplorer que la physiologie animale, qui est à la base de sa
constitution, se soit vue affublée d'une intelligence laquelle la fait souvent
agir en sa défaveur, quand ce n'est pas contre nature. Nature dans laquelle je
confonds les deux sexes.
Benoîte Groult publierait son ouvrage en 2021, qu'y
retrancherait ou ajouterait-elle ? Quel progrès ou quelle régression y
ferait-elle valoir ?
Il y certes de nos jours une présence féminine plus
importante à la représentation nationale. 8 femmes députées lors de la
publication d'Ainsi soit-elle en 1975, 224 aujourd'hui. Mais serait-ce un
progrès suffisant pour faire admettre à Benoîte Groult que la position de la
femme a évolué dans le bon sens en notre pays, avant d'élargir le débat à la
condition féminine de par le monde. Je suis un homme, j'aurais tendance à dire
oui. Mais je suis aussi quelqu'un de prudent, qui se sait progresser en terrain
glissant et ne veut pas se prononcer à la place d'autrui (substantif neutre
fort heureusement). Allons-y donc à pas comptés.
Car j'ai lu en effet à la page 212 de l'édition le Livre de
Poche toutes les occasions édictées pour un homme d'être taxé de misogynie, selon
Benoîte Groult. J'ai donc peur d'aller plus avant dans cette chronique, au
risque de faire un faux pas et être vertement recadré par les contributeurs de
Babelio, dont on sait que la grande majorité est constituée de contributrices.
Je me suis risqué à lire Ainsi soit-elle. le risque étant,
en qualité de représentant de la partie incriminée que je suis, de s'entendre
dire des vérités quelque peu dérangeantes. Plongé dans cet ouvrage, j'avais
l'impression d'être ce jeune homme que Benoîte Groult avait rencontré dans la
Librairie des femmes, rue des Saints-Pères à Paris (*). Un intrus, un égaré ?
Peut-être pas. Il avait osé franchir la porte de cette boutique qui n'affiche
que des ouvrages d'auteures (ou autrices, que je trouve moins heureux) dans ces
rayons. J'allais préciser auteures féminines. Mais je me suis rendu compte à
temps que notre contexte linguistique ayant évolué – dans le bon sens ? – je
m'empêtrais dans le pléonasme puisque le substantif se suffit désormais à
lui-même pour indiquer le genre de celui ou celle qui tient la plume, plus
souvent le clavier de nos jours. Il y a toujours des exceptions qui confirment
la règle. Je ne me risquerai pas à féminiser sapeur-pompier.
Je me rappelle mon passage sous les drapeaux à une époque où
les femmes faisaient leur entrée dans le métier. Jeunes enorgueillis de notre
triomphante virilité sous l'uniforme, nous nous sommes entendus dire par un
gradé qu'il y aurait désormais des femmes hommes du rang. L'institution a mis
quelques mois à corriger le discours par une directive officielle. Il
s'agissait alors de dire des femmes militaires du rang, et que cela valait pour
les hommes.
Je n'étais donc plus vierge de lecture traitant du féminisme
après m'être ouvert au sujet avec l'ouvrage de Simone de Beauvoir comme je l'ai
déjà dit. Ouvrage qui m'avait ouvert à ce que mon éducation de garçon m'avait
laissé concevoir comme naturel de traiter l'Autre avec morgue, avant que ce ne
soit avec convoitise - l'Autre étant la femme et représentant quand même la
moitié de l'humanité nous dit Simone de Beauvoir – que cette vision de la femme
était le résultat d'une histoire datant de l'origine des temps depuis que
l'homme s'est octroyé un statut de supériorité sur la femme. Statut dont elle
peine encore à démontrer le caractère infondé, usurpé. Je ne vais pas dire que
je tombais de haut. Mais s'entendre clamer des vérités propres à déchoir son
acquit, inculqué, gravé dans la personne par une éducation ad' hoc - puisqu'il
ne saurait être question d'inné en ce domaine - est toujours un peu
déstabilisant. Il s'agissait donc d'une remise en question fondamentale.
Et pour ce qui est des vérités déstabilisantes, il y a ce
qu'il faut dans l'ouvrage de Benoîte Groult. Elle nous les assène avec un
langage certes moins policé que celui de Simone de Beauvoir dont le propos est
aligné sur le registre philosophico-historico-sociologique édulcoré. Benoîte
Groult n'hésite à renvoyer le mâle à ses insuffisances, à lui faire constater
l'assoupissement de ses attributs virils à peine a-t-il volé un plaisir égoïste
à celle à qui il n'a pas été capable de faire partager son extase fugace.
Laquelle a quant à elle l'indulgence coupable de ne pas faire état de sa
frustration. le verbe est cru avec Benoîte Groult. L'inventaire des motifs
d'usurpation de supériorité est exhaustif. Et de déplorer que des millénaires
d'injustice ne se corrigeront pas en quelques années, qu'il faudra encore
attendre des générations avant le complet mea culpa masculin et espérer obtenir
l'égalité des sexes. Au constat de l'inertie masculine, le compte n'y est donc
pas encore en 2021 alors que je prête une oreille distraite à ce phénomène
culpabilisant que quelques courageuses s'époumonent à clamer parfois au péril
de leur vie.
On ne naît pas femme, on le devient nous a dit Simone de
Beauvoir. Vous naissez hommes et voulez le rester et ne rien lâcher de votre
statut usurpé nous dit Benoîte Groult. À quand ce que nous a promis la grande
Révolution gravant sur le fronton de nos édifices publics une devise nationale
qui peinent à se réaliser : Liberté Égalité Fraternité. D'autant que les
Jacobins et autres Montagnards de service au pied du rasoir national s'étaient
rendus compte, entre deux charrettes en chemin vers le supplice ultime, s'être
quelque peu avancés quant aux prétentions égalitaires, réalisant ce qu'ils
avaient à perdre. Dans leur esprit la devise n'incluait donc pas forcément nos
consœurs et il convenait de rabaisser les prétentions d'une Olympe de Gouge,
pionnière du féminisme, à déclarer à la face des badauds avides de voir sa tête
rouler dans la sciure que si la femme peut monter à l'échafaud, elle doit avoir
le droit de monter à la tribune.
Même prévenu du blâme qui planait au dessus de mon
incrédulité masculine, que d'aucunes pourront déclarer feinte, je dois quand
même avouer être quelque peu abasourdi, si ce n'est effaré, par ce qui a pu
être dit ou écrit par des personnes éminentes - des hommes bien entendu mais
pas seulement lorsqu'on lit les propos de certaines femmes dont la reine Victoria - et dont Benoîte Groult nous fait l'inventaire dans son ouvrage, sans
parler des mutilations sexuelles qui cantonnaient les femmes à la seule
procréation les privant de toute sensualité . Écrivains, hommes politiques,
psychanalystes (Freud a particulièrement les faveurs de notre auteure
féministe), médecins et hommes de sciences et autres marabouts, tous y ont
contribué, sans parler des hommes d'église qui bien entendu intervenaient quant
à eux qu'en porte parole de Dieu, tous à proférer ignominies, insanités et
menaces qui leur vaudraient aujourd'hui la saisine des tribunaux mais qui en
leur temps ont conforté l'idée que "l'absence de pénis, c'est con".
Dixit Benoîte Groult qui n'y va pas par quatre chemins pour dénoncer ce
postulat faisant de la misogynie un racisme encore plus tenace, plus universel
et surtout plus facile à exercer que tous les autres.
Voilà donc avec Ainsi soit-elle de quoi déchoir qui pêche
par mâle attitude. Cette survivance d'un passé encore présent que n'ont pas
encore nivelée les lois sur la contraception et l'interruption volontaire de
grossesse chèrement acquises par celles qui ont eu le courage d'affronter des
assemblées très majoritairement masculines. Ces dernières légiférant sans
vergogne sur des questions spécifiquement féminines auxquelles ils ne pouvaient
par nature rien comprendre puisqu'affaires de femmes. Femmes dans leur vécu
intime, leurs entrailles comme le veut la physiologie mais plus surement dans
leur cœur tant ces questions ont fait couler de larmes.
Et Benoîte Groult de secouer le cocotier, y compris la
variété femelle de l'espèce, pour faire comprendre à ses consœurs qu'elles ont
leur part de responsabilité à se laisser enfermer dans le statut de dominées.
J'espère Madame Groult que l'observation de votre postérité vous laisse quelque
espoir, si cette notion a un sens dans l'au-delà, pour que ce cri de colère
gravé dans les pages d'Ainsi soit-elle et abandonné à notre entendement
désormais éclairé fasse enfin accéder la femme à cet état psycho-affectif que
vous briguiez pour elle, en forme d'un idéal qui ne serait finalement que
normalité : l'accomplissement de la personne enfin déconnectée de la notion de
genre.
(*) maintenant 33/35 Rue Jacob, 75006 Paris - site Web https://www.librairie-des-femmes.fr/
vendredi 23 juillet 2021
L'épopée vaudoise : Tome 3 - Le glaive et l'évangile ~~~~ Hubert Leconte
Alors que le courant humaniste de la Renaissance déferle sur la France en cette première moitié du XVIème siècle, avec sa propension à placer l'homme au centre des préoccupations, il y a urgence à endiguer les velléités écartant quelques écervelés du discours divin. Dans sa précipitation enragée à sauvegarder ses positions et avantages la sainte église a tendance à mettre la charrue avant les bœufs en matière de justice, à savoir tuer les vivants et les juger par la suite. Ce fut le sort réservé aux Vaudois du Luberon.
Las de tendre l'autre joue, las de leurs recours infructueux auprès de la justice du roi, les Vaudois furent tentés par la rébellion armée. le glaive et l'évangile, troisième opus de l'épopée vaudoise, aborde ce dilemme qui divise la communauté, partagés que furent certains entre l'attitude non violente que leur dictent les évangiles et le désespoir qui les envahit de se voir pourchassés sans cesse et sans recours.
La trilogie d'Hubert Leconte met le focus sur cette page d'histoire locale qui, aussi dramatique et intolérable qu'elle ait pu être, n'est qu'un révélateur de ce qui peut se produire quand la liberté de conscience est foulée aux pieds. Sous couvert de légitimation divine, dont on attend toujours consécration officielle de la part du Celui qui est invoqué dans ces religions dîtes du Livre, la finalité est toujours la même depuis que l'homme est homme, torturé qu'il est par le mystère de la vie : l'appropriation du pouvoir et des richesses de ce bas monde en contre partie d'une promesse de paradis pour ceux à qui on mâchait le travail puisqu'ils n'avaient qu'une attitude à avoir : croire.
Contrairement à l'église cathare, laquelle a complètement disparu du paysage religieux au cours du 13eme siècle, l'église de Pierre Valdo, acquise à la Réforme, a toujours ses adeptes de nos jours. On trouve encore des lieux de cultes se revendiquant du dogme initié par Pierre Valdo dans le Piémont italien, région dans laquelle les actions d'éradication ont été plus dispersées et moins assidues.
samedi 17 juillet 2021
Jésabel ~~~~ Irène Némirovsky
mardi 13 juillet 2021
L'épopée vaudoise : Tome 2 - Les larmes du Luberon ~~~~ Hubert Leconte
Ils avaient quitté les vallées alpines, pourchassés qu'ils étaient par l'église de Rome. Elle avait fait d'eux des hérétiques. En cette première moitié du XVIème siècle les Vaudois avaient trouvé en Provence quelques décennies de répit à la traque dont ils étaient l'objet. Mais s'ils espéraient vivre leur foi en paix c'était sans compter sur l'obstination d'une église qui n'avait pas renoncé à purger cet abcès que représentait à ses yeux leur communauté.
Mais en dépit du pouvoir considérable qui était le sien en son temps de
monopole sur les consciences, l'Église n'avait pas les moyens militaires
d'éradiquer la dissidence. Elle souhaitait en outre dans sa grande perversité
s'exonérer des crimes que ne manquerait pas de provoquer la reconquête des
consciences à sa seule dévotion. Elle devait donc avoir recours au bras séculier
pour combattre les Vaudois dont la doctrine prêchant la pureté des évangiles
s'était propagée. C'était surtout une façon de faire oublier le commanditaire
et endosser au pouvoir temporel la responsabilité des dommages. Il fallait donc
convaincre François 1er que ce qu'elle qualifiait de déviance constituait un
vrai danger pour le royaume. L'argument était le risque de scission qui pouvait
faire basculer la Provence dans les bras de son ennemi juré, Charles Quint.
François 1er n'avait-il pas déjà goûté de ses geôles après sa défaire de Pavie.
Convaincu par les sbires du Pape de la nécessité de leur éradication, François
1er profita du transit de ses troupes vers le port de Marseille pour lancer une
grande offensive contre les Vaudois. Cela donna lieu à l'un des plus grands
massacres qu'ait connu la communauté vaudoise dans cette partie de la Provence,
aujourd'hui lieu de villégiature de fortunés : le Luberon. Les disciples de
Pierre Valdo en ce pays, où ils pensaient pouvoir jouir du fruit de leur labeur
et vivre dans la paix des évangiles furent passés au fil de l'épée sans
distinction de sexe ni d'âge. Non sans avoir imposé les derniers outrages à
tout ce qui pouvait assouvir les bas instincts de soudards qui pour la plupart
étaient d'ailleurs mercenaires loués aux possessions du Saint empire romain
germanique. La justice du roi était passée. Reste que cette page dramatique de
l'histoire de la Provence et de l'épopée vaudoise est à mettre au crédit de
celle qui prêchait charité, tolérance, pauvreté et chasteté, se gardant bien de
l'appliquer à elle-même, celle qui revendiquait la majuscule quand on
l'évoquait : la sainte Église catholique romaine.
Hubert Leconte nous
fait vivre tout au long de cet édifiant ouvrage à la fois les espoirs et le
climat de peur permanente dans lequel demeuraient les Vaudois. Il met en oeuvre
en parallèle dans son écriture un surprenant lyrisme poétique destiné à
glorifier la belle nature qui sert de décor à cette tragédie, et à évoquer
aussi l'amour que les Vaudois vouaient à la terre nourricière. Une beauté qui
en ce temps se payait au prix fort tant la tâche était rude pour tirer
subsistance de ces collines arides. Nous apprécions mal en nos jours fort heureusement
plus serein quant à la liberté de conscience le climat de peur régnant au
quotidien et faisant de ceux qui osaient promouvoir une doctrine rivale de
l'officielle des gibiers traqués. Nous apprécions mal la force d'une foi
chevillée à l'âme en ces temps où tout s'expliquait en Dieu et par Dieu, selon
un discours imposé par celle qui n'admettait ni contradiction ni concurrence en
la matière.
Communion avec la nature, solidarité confessionnelle, dans ce superbe ouvrage
fort bien documenté Hubert Leconte nous
rappelle à ces données d'un quotidien fait de labeur, de foi mais surtout de
peur. Cela donne ce splendide ouvrage, deuxième tome de l'épopée vaudoise à une
époque où régnait la loi du plus fort.
"Selon que vous serez puisant ou misérable les jugements de cour vous
rendrons ou blanc ou noir." La fable aurait pu s'appliquer aux Vaudois
malades quant à eux d'une peste qui n'était rien d'autre que leur fidélité à la
parole première des évangiles. Peste que leur sincérité, que leur foi.
1991~~~~Franck Thilliez
Combien de temps Suzanne tiendra-t-elle peut-on aussi se demander dans une vie
de femme de flic du 36 quai des Orfèvres à laquelle Franck Sharko la
destine ?
Alors que nombre de lecteurs fidèles de Franck Thilliez, si l'on en juge par sa
popularité, ont sans doute déjà les réponses à ces questions, j'avoue quant à
moi n'être pas mécontent de débarquer dans les couloirs du 36 sur les traces de Sharko avec
ce premier roman de Thilliez pour moi. S'il remonte le temps pour les fidèles,
il me fait quant à moi prendre l'histoire à sa source. Je sais d'ores et déjà
que je suivrai le cours des aventures, promises "compliquées et
sordides", de celui qui est devenu commissaire sous la plume de Franck
Thilliez. Cette mise en bouche m'a ouvert l'appétit pour le reste du menu qui
s'affiche depuis longtemps déjà sur les étals des libraires, et que j'avais
méprisé jusqu'alors.
C'est donc un bleu qui débarque dans le sanctuaire de la Crim en 1991, au 36. Ce
seul numéro sur un quai suffisait à évoquer le lieu mythique. Il y est
accueilli avec circonspection par les anciens. On ne s'en étonne pas. Intégrer
la Crim du 36 n'est pas y être admis. Sharko va
devoir faire ses preuves, à commencer par sortir de cette forme de placard dans
lequel on l'affecte d'emblée, à compulser les archives pour une affaire restée
non résolue sans être encore classée : le meurtre de trois femmes quelques
années avant son arrivée. Cadeau de bienvenue au petit nouveau pour qu'il se
fasse les dents et montre de quoi il est capable par la même occasion.
Mais s'il est jeune, cet inspecteur qui postule au nec plus ultra de la Crim,
il n'est pas dénué de personnalité pour autant. Et plus que de personnalité, de
psychologie. Il a compris qu'il ne fallait pas jouer les gros bras avec les
anciens, sans toutefois se laisser marcher sur les pieds. Il saura faire sa
place en leur montrant qu'il a de l'intuition et de la persévérance. Les
fervents de Sharko le
savent bien, eux qui attendaient de Franck Thillier qu'il leur parle de ses
débuts. C'est chose faite avec 1991. Ce
dernier nous dresse la caricature de son héros fétiche plus par ses qualités
morales et intellectuelles que physiques. Au lecteur de se faire le portrait
d'un homme qui ne manque ni de disponibilité, c'est le moins qu'on attende d'un
jeune à la Crim, ni de courage. Mais pas le courage de l'inconscience, le
courage lucide de celui qui veut réussir sa carrière autant que sa vie
amoureuse. Une gageure ? Dans le métier ce n'est pas gagné d'avance. Les
exemples ne manquent pas de ceux qui n'ont pas été au bout de leur contrat de mariage
quand ce n'est pas au bout de leur carrière.
Ce personnage me paraît d'emblée engageant, voire sympathique. Il n'a rien du
super héros qui bouscule tout sur son passage, monopolise le regard des femmes
et terrorise les truands. C'est ce qu'on peut appeler un mec normal - le
langage populaire n'est pas déplacé dans le contexte. Un homme de la vraie vie,
un authentique. On peut même dire que dans 1991, il ne
focalise pas particulièrement l'attention. Il est celui qui débarque, mais à
qui on promet quand même un bel avenir en épilogue, parce qu'on sait que les
malfrats travaillent pour lui, pour lui construire un avenir. Aussi parce que
c'est Sharko,
et que son personnage peuple déjà les étals des libraires. Une dizaine de
romans témoigne des "affaires compliquées et sordides" desquelles il
s'est sorti, pour la plus grande popularité de son auteur.
1991 est
un ouvrage réaliste à plus d'un titre. Outre les timides débuts du novice qui
doit s'intégrer dans la prestigieuse brigade, il s'agissait de restituer le
contexte d'une époque où pour téléphoner il fallait trouver une cabine, où
l'ADN n'avait pas encore déployé toutes ses possibilités et l'informatique
balbutiait. Il fallait aussi concevoir une intrigue dans laquelle dédoublement
de la personnalité et les troubles psychiques liés à l'orientation sexuelle se
concevaient dans l'environnement d'une société encore empesée par les non-dits
dans ce domaine.
Cet ouvrage à l'écriture agréable et fluide qui implique avec bonheur l'univers
de la magie et les pratiques vaudous clandestines. Ces milieux occultes
s'entrelacent à merveille dans cette première affaire qui donne l'occasion au
petit nouveau de la Crim de montrer qu'il n'a ni les deux pieds dans le même
sabot ni le cerveau comprimé par la pression du métier. Et disons-le tout net,
sans ne rien dévoiler de l'intrigue, Sharko aura
gagné son ticket d'admission à la célèbre brigade. Mais ces premières enquêtes
lui auront donné quelques sueurs froides et un joli cas de conscience quand un
collègue, un ancien, pourrait bien avoir fait quelque entorse à la déontologie.
Des enquêtes qui, accessoirement, auront fait passé un drôle de réveillon à
notre jeune inspecteur, mais il n'est pas nécessaire de le dire à Suzanne. Elle
pourrait bien remettre en question ses projets d'alliance et de vie parisienne.
lundi 5 juillet 2021
Dans les bois éternels~~~~~Fred Vargas
Des êtres dissociés, des cousins remués, un compatriote des
vallées pyrénéennes qui parle en alexandrins, une médecin légiste dont la
soixantaine n'a pas entamé le charme propre à faire chavirer Adamsberg, et pour
couronner le tout des cerfs éventrés en Normandie, avouons qu'il y a de quoi
disperser les idées et y faire perdre son latin à un être rationnel. Oui mais
voilà, Adamsberg n'est pas un être rationnel. C'est un "pelleteur de
nuages."
Disons-le tout net Adamsberg a un problème de management. Il pèche par manque
de capacité de persuasion, d'esprit de cohésion et de pédagogie à l'égard de
ses subordonnés. En fait, il ne veut pas s'en donner la peine. Ils doivent donc
le suivre aveuglément. Réfléchir, c'est s'opposer. Car lorsqu'il est pris dans
les réflexions que lui inspire son sixième sens, ses équipiers en sont réduits
aux croyances. Il y a donc ceux qui croient et ceux qui ne croient pas. C'est
pour ça que sa brigade criminelle est souvent divisée.
Il faut dire que dans l'affaire des bois éternels, il y a de quoi leurrer son
monde. le fil qui pointe de l'écheveau est plutôt ténu et fragile pour élucider
le meurtre de deux gros bras que rien ne relie au milieu du banditisme. Ce fil,
lorsqu'on l'exploite, fait apparaître une recette codée extraite d'un grimoire
du 17ème siècle, celle d'un d'élixir de vie. C'est confus à souhait, voire
impénétrable au commun des mortels. Il faudra bien toutes les ressources
combinées d'un commissaire inspiré et de son adjoint instruit, l'encyclopédie
de la brigade, fraîchement promu commandant, pour démêler l'écheveau que le
commanditaire des crimes a savamment enchevêtré. Fred Vargas l'a
bien mitonné celui-là. Difficile pour le lecteur de se faire son opinion du
coupable avant qu'Adamsberg le lui désigne.
On retrouve la passion de l'auteure pour les contes et légendes du Moyen-âge.
Mais c'est tellement tortueux qu'on a du mal à se figurer un esprit moderne
s'engluer dans pareille machination autour d'une croyance d'un temps où la
pierre philosophale faisait encore rêver. C'est un peu dommage, cela déprécie
le scénario. Mais soit, le genre autorise tous les artifices pour convoquer les
fantômes du passé et tenir en échec les techniques d'investigation modernes.
En tout cas cette affaire donne à Adamsberg l'occasion de renvoyer l'ascenseur
à sa fidèle lieutenant Violette Rétancourt, dont d'aucuns prétendent que son
gabarit et ses chances de séduction refoulées lui autorisent certaines libertés
et prises de risque. Mais cette fois elle est allée un peu loin dans
l'indépendance. Elle avait extirpé son patron du Canada où il était en mauvaise
posture, il la tire in extremis d'un mauvais pas. le flair d'Adamsberg lui fera
faire confiance à celui d'un membre de la brigade qu'on avait pris l'habitude
de voir se réchauffer sur la photocopieuse. C'est Boule, le chat. Pour une fois
il intervient dans une enquête. On en pensera ce qu'on voudra.
Des êtres dissociés entre l'alpha et l'oméga, des cousins remués, y aurait-il
du rififi dans la famille Adamsberg ? La lecture des Bois éternels nous
affranchit sur ces expressions pour le moins surprenantes lesquelles trouvent
leur éclaircissement dans la criminologie ou le parler local. L'étude des
caractères étant une marque de fabrique chez Fred Vargas, elle
nous soumet un ouvrage dans lequel on reconnaît bien sa touche cérébrale pour
nous concocter une énigme musclée sur fonds historique. Un bon moment de
lecture à partager l'ambiance de la brigade criminelle version Adamsberg avec
laquelle j'ai eu l'occasion de me familiariser.
jeudi 1 juillet 2021
L'épopée vaudoise : Tome 1 - La croix des humiliés ~~~~ Hubert Leconte
J'ai entrepris de relire la trilogie de Hubert Leconte relatant l'épopée vaudoise des Alpes vers le Luberon. Les Vaudois que l'on présente parfois comme les précurseurs du protestantisme sont les disciples de Pierre Valdo. Ce riche marchand lyonnais du XIIème siècle avait fondé La fraternité des pauvres de Lyon à qui il avait légué ses biens. Il a été excommunié par l'Église. Sa faute : avoir fait traduire la Bible en langage vernaculaire, le franco provençal, pour la rendre intelligible au petit peuple. Un comble serait-on tenté de dire.
Pierre Valdo qui s'ouvrit de cette déconvenue à un ami érudit s'entendit
répondre " … tu te rends compte où cela nous entraîne. Savoir lire c'est
peut-être un jour contester tout le savant édifice de règles, de canons, de
dogmes que l'Église a élaborés depuis plus d'un millénaire".
La croix des humiliés, premier tome de la trilogie, situe son intrigue
romanesque à la fin du XVème siècle dans les vallées alpines. Pourchassés par
l'église officielle de Rome, les Vaudois avaient essaimé. Forcés qu'ils étaient
d'investir les lieux les plus inhospitaliers pour pouvoir vivre leur foi en
relative tranquillité; foi qui n'était, rappelons-le, rien d'autre que la
stricte observance des évangiles.
Or, parait-il que les évangiles n'envisagent pas de vivre dans le luxe et la
luxure. Pierre Valdo avait donc eu le tort d'ouvrir les yeux de ses disciples à
ces travers dans lesquels se vautraient la curie romaine et toute sa hiérarchie
épiscopale dont on connaît trop la toute puissance en ces temps
d'obscurantisme. Cette dernière a donc mis sur pied cette formidable
juridiction ecclésiastique d'exception taillée sur mesure pour préserver ses
monopole et intérêts, et faire retourner le manant éclairé aux ténèbres de
l'ignorance : l'inquisition.
Et l'évêque menaçant Pierre Valdo de haranguer : "Il serait trop long de
vous expliquer les mystères de la Sainte Trinité, de l'incarnation, et de la
consubstantialité. Nous avons pensé pour les pauvres qui n'ont qu'un seul
effort à fournir : croire."
Procès en sorcellerie, qualification d'hérésie, les Vaudois ont eu les faveurs
de cette épouvantable machinerie tyrannique dont on connaît trop les méthodes
barbares pour faire avouer les martyres pris dans ses carcans. On en connaît
aussi trop la conclusion brûlante. Hubert Leconte,
au travers de ce roman historique parfaitement documenté nous fait vivre
l'errance de ces disciples convaincus d'une foi dictée par les évangiles en
laquelle ils pensaient assurer leur salut, et qui fit leur malheur. On ne peut
s'empêcher de faire le rapprochement avec la foi cathare qui a enflammé le
sud-ouest de notre pays dans les mêmes temps alors qu'elle prêchait elle aussi
le retour à la pureté du dogme, aux textes originels des évangiles.
En ce XVème siècle d'illettrisme et d'ignorance, l'Église toute puissante règne
sur les esprits et les consciences. Elle n'admet ni contradiction ni
concurrence. Elle a tout prévu, y compris un moine pour absoudre l'inquisiteur
des violences – ce terme étant en la circonstance un doux euphémisme - qu'il se
voit contraint d'infliger à ceux qui osent prêcher une autre parole que
l'officielle. Y compris et surtout si cette parole est de nature à faire
éclater aux yeux des puissants briguant la pourpre cardinalice leur déviance au
regard de ce qu'ils n'ont de cesse de ressasser dans leurs sermons : les fameux
dix commandements que leur comportement propre violent impunément tous les
jours.
Expulsés de leurs vallées alpines vers une région qu'ils espèrent plus
accueillantes pour leur sincérité biblique, les Vaudois n'en ont pourtant pas
fini avec les faussaires de la foi. Les larmes du Luberon, le deuxième tome, va
me le remettre en mémoire. Les quelques pierres vestiges de leurs modestes
masures au creux des vallées et les grottes perchées à flancs de falaise qui
parsèment la campagne provençale dans lesquelles ils cherchaient refuge gardent
la mémoire de ces pauvres hères à la foi, la vraie foi, chevillée au corps.